En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Publié le Mercredi 18 novembre 2015
Gustave Lassalle Bordes , 1815-1886, le martyrs des sept maccahabées, église saint Raymond, Audierne, 29770
Ce peintre d'histoire du 19e siècle, issu de Gascogne, monte à Paris et entre dans l'atelier d'Eugène Delacroix qu'il aide pour la décoration des peintures murales des bibliothèques du palais Bourbon et du Sénat. De retour en province , cela lui vaudra de nombreuses commandes dans les églises et châteaux de la région.
Le scène des sept frères et de leur mère est représentée comme une peinture d'histoire.
Le roi Antiochus est assis sur son trône majestueux dans grande robe rouge. Il est entouré de ses hommes qui assistent froidement au spectacle. La foule se presse derrière les arcades du palais. Seule une jeune femme se précipite vers les jeunes gens massacrés.
Et sur le devant de la scène, le drame : un jeune homme à la tète enfantine, dénudé, prie les yeux levés vers le ciel, il est soutenu par sa mère qui penchée vers lui, montre le ciel et l'engage au martyr pour respecter son Dieu. Déjà plusieurs frères sont morts et gisent à ses pieds, dans l'ombre. Un autre frère est amené brutalement vers la scène du supplice.
Sept frères avaient été arrêtés avec leur mère. À coups de fouet et de nerf de bœuf, le roi Antiocos voulut les contraindre à manger du porc, viande interdite.
Leur mère fut particulièrement admirable et digne d’une illustre mémoire : voyant mourir ses sept fils dans l’espace d’un seul jour, elle le supporta vaillamment parce qu’elle avait mis son espérance dans le Seigneur.
Elle exhortait chacun d’eux dans la langue de ses pères ; cette femme héroïque leur parlait avec un courage viril :
« Je suis incapable de dire comment vous vous êtes formés dans mes entrailles. Ce n’est pas moi qui vous ai donné l’esprit et la vie, qui ai organisé les éléments dont chacun de vous est composé.
C’est le Créateur du monde qui façonne l’enfant à l’origine, qui préside à l’origine de toute chose. Et c’est lui qui, dans sa miséricorde, vous rendra l’esprit et la vie, parce que, pour l’amour de ses lois, vous méprisez maintenant votre propre existence. »
Antiocos s’imagina qu’on le méprisait, et soupçonna que ce discours contenait des insultes. Il se mit à exhorter le plus jeune, le dernier survivant. Bien plus, il lui promettait avec serment de le rendre à la fois riche et très heureux s’il abandonnait les usages de ses pères : il en ferait son ami et lui confierait des fonctions publiques.
Comme le jeune homme n’écoutait pas, le roi appela la mère, et il l’exhortait à conseiller l’adolescent pour le sauver.
Au bout de ces longues exhortations, elle consentit à persuader son fils.
Elle se pencha vers lui, et lui parla dans la langue de ses pères, trompant ainsi le cruel tyran : « Mon fils, aie pitié de moi : je t’ai porté neuf mois dans mon sein, je t’ai allaité pendant trois ans, je t’ai nourri et élevé jusqu’à l’âge où tu es parvenu, j’ai pris soin de toi.
Je t’en conjure, mon enfant, regarde le ciel et la terre avec tout ce qu’ils contiennent : sache que Dieu a fait tout cela de rien, et que la race des hommes est née de la même manière.
Ne crains pas ce bourreau, montre-toi digne de tes frères et accepte la mort, afin que je te retrouve avec eux au jour de la miséricorde. »
Lorsqu’elle eut fini de parler, le jeune homme déclara : « Qu’attendez-vous ? Je n’obéis pas à l’ordre du roi, mais j’écoute l’ordre de la Loi donnée à nos pères par Moïse.
Et toi qui as inventé toutes sortes de mauvais traitements contre les Hébreux, tu n’échapperas pas à la main de Dieu.
2 Martyrs d’Israël 7, 1 . 20-31
A travers ce récit des sept frères martyrs, c'est l'une des premières affirmations de la Résurrection des morts qui apparaît dans la tradition juive
Antiochus Epiphane régnait vers 165 av JC, et menait une terrible persécution contre les Juifs, car il voulait lui-même être vénéré comme un dieu. Il voulait que les Juifs renoncent à leurs pratiques telles que respecter le jour du sabbat, refuser d’adorer un autre dieu que le Dieu d'Israël, observer les règles alimentaires de la loi juive.
La mort des sept fils se déroule selon un scénario identique : chacun d'eux prend la parole devant le roi persécuteur avant de mourir. Mais c’est surtout la figure admirable de leur mère qui est mise en relief dans cette scène. C’est elle qui va exhorter ses fils à mourir, et leur permettre d’affronter la mort avec courage, en leur insufflant la foi en la résurrection des morts.
C'est effectivement au sein de cette persécution par le roi grec, qu’est apparue et s’est développée dans le monde juif, la foi en la Résurrection des morts à la fin des temps. Une des premières attestations en est le chapitre 12 du livre de Daniel. Ici elle est plus largement affirmée, et il faut remarquer que la résurrection n'est envisagée que pour les justes.
La foi de la mère se fonde sur la fidélité et la bonté indestructible de Dieu : « puisque nous mourons par fidélité à ses lois, le Roi du monde (sous-entendu le véritable Roi du monde) nous ressuscitera pour une vie éternelle », dit l’un des fils. Mais la mère avance plus loin dans la compréhension du Dieu qui est le Dieu de la vie : puisque Dieu a donné la vie à toutes choses et aux hommes dès l’origine, comment pourrait-il abandonner son œuvre à la mort ? L’admirable raisonnement de cette femme s’appuie sur la contemplation de l’œuvre créatrice de Dieu ; celui qui a présidé à l’origine de toutes choses, celui qui ne cesse de maintenir toutes choses, ne peut que rendre la vie à ceux qui la risquent par amour pour lui. Un pas encore : Dieu a tout créé de rien, il peut donc rendre la vie de la même manière ; il est le Dieu créateur et sauveur, qui relèvera de la mort les hommes qui ont pour lui renoncé à leur vie, et les appellera à une vie nouvelle.